22 juillet 2007

Mardi 17 juillet 2007. San Remo / Alassio


San Remo.

Un hôtel, non une sorte de pension où il faut quelque temps pour situer qui est la patronne. Ici, tout est félinien... La femme qui louche habillée dans une robe de soirée bleu azur nous sert de traductrice. Je ne peux m’empêcher de fixer son mascara bleu qui coule de ses yeux… Derrière dans la salle à manger décrépie, l’homme a tout faire s’agite, tentant de satisfaire tous les convives... Mais qui sont-ils, des clients ? Des amis ? Ils semblent tous se connaître, je les regarde a leurs tables : une cliente française, soixante-dix ans révolus, a abandonné toute coquetterie pour une autorité revendiquée. Sa croix de malte va et vient à chaque bouchée : elle est venue régler la succession de sa mère… L'homme à tout faire, petit et sec, me rappelle Arlequino tant son visage porte lassitude, tristesse et douceur: Un voile blanc semble couvrir son visage, le maquillage arlequino... Il abandonne son service pour monter à l’étage. Je le suis pour dormir.

Alassio.

"Zimmer,Zimmer,Zimmer, glaces léchées avec gourmandises, voitures immatriculées X et J déjà plus de trois mille par jour depuis la frontière..." Je sens la plume, la griffe, l'ongle, le corps, les amas de corps qui se juxtaposent pour ne former qu'une longue ligne humaine, rehaussée par les parasols clinquants aux couleurs des plages privées. Ici, pas de rire, tous sont en représentation... Sur l'arrière de la plage d'autres se laissent aller. Curieusement, le bord du rivage est un lieu visible où le corps est montré dans une posture, une attitude, un rapport social. Mais plus on s’enfonce dans la rangée de parasols, de transats plus le corps est relâché, s’offrant a un soleil dont il ne semble jamais rassasié…Pasolini me frôle, me souffle que l'homme se plait toujours dans la densité, dans le corps à corps jusqu’à s'en dégoûter... Rire, rire aux éclats pour respirer tant cette plage se fait microscosme écoeurant.... Dans l’arrière de la ville, les différentes boutiques s’alignent comme dans un parc d’attraction. Artifice des corps et du lieu dans lequel ils évoluent. Seule, la jeune femme à bicyclette, qui nous frôle, offre la légèreté de sa robe blanche soulevée...

San Remo.
Casino... Rien, la ville de nuit n’offre rien de plus que le jour... Balais de voiture sur artères ennuyeuses...

Lise.


San Remo.

"Hôtel Graziella", le néon rouge n'est pas encore allumé. Les cheveux blonds de la patronne tranchent sur sa robe noire, je suppose qu'elle est la responsable de la décoration de notre chambre. Des murs roses douteux, assortis au couvre lit, d'un rose un peu moins défraîchit... Mais le mauvais goût n'entame pas la gentillesse, et c'est la raison pour laquelle tant d'habitués sont ici.
Je ne sais pas quel oeil regarder quand la petite dame qui louche me parle, alors je regarde son nez.... Je ne sais pas quoi dire quand la vieille dame franco-italienne me dit qu'elle vient régler des affaires de succession, alors je lève les sourcils.... Ici c'est un peu comme une maison de famille, une famille genre "Cluedo"...
San Remo n'avait pas grand intérêt, et nos comptes n'étaient pas assez remplis pour jouer au casino ; Graziella devait être jeune quand Pier Paolo Pasolini y est passé, mais c'est sûr, il aurait aimé ces gens-là...

Alassio.

" Le monde cruel et merveilleusement vivant : marée d'établissement balnéaires "Neptune" avec les 1er vacanciers (...)C'est le fleuve bariolé de la vie congestionnée par le désir d'être, au sens le plus immédiat : peu importe comment, mais être ici, sur ces superbes plages, chacun au mieux de ces possibilités, à jour de l'été à concentrer ces forces pour être heureux et donc, à l'être réellement, à voir, à être vu, dans une fête amoureuse." (p 11-12)
Je sens le souffle des mots de Pasolini dans mon oreille. Tout est toujours là. Une longue bande de parasols multicolores longe la mer et dessine la plage. Pas un cm2 n'est perdu. Le grand diktat du tourisme... Chacun y trouve sa place, les vacanciers les plus anciens déjà trop bronzés, les derniers arrivés encore trop pâles.
L'odeur de la crème solaire flotte partout, l'odeur du soleil sur la peau, l'odeur des vacances. Comment se fondre impunément dans ce décor de congés payés?

Anne.

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